Perturbations

Toutes les informations et citations suivantes dont les sources ne sont pas précisées proviennent  du 4ème rapport du GIEC - Synthèse.

Attention, ceci étant la synthèse d’une synthèse, la simplification qui en découle ne doit pas conduire à des conclusions trop rapides. Pour limiter les simplifications à outrance, il faut raisonner en terme de probabilité : Il est à X % probable que la modification de Y% de la valeur de certains indicateurs soient dus à l’activité humaine.

1. État des lieux

1.1. Les indicateurs

  • Température moyenne du globe : Augmentation de 0,8°C depuis 1850 et de 0,75°C/décennie actuellement (à comparer au passage d'une ère glaciaire à interglaciaire de 5°C répartis sur 10 000 ans, soit 0,5°C/millénaire). 
  • “Onze des douze dernières années (1995–2006) figurent parmi les douze années les plus chaudes depuis 1850, date à laquelle ont débuté les relevés instrumentaux de la température à la surface du globe. Alors que, dans le troisième Rapport d’évaluation (TRE), on estimait à 0,6 [0,4-0,8] °C la tendance linéaire au réchauffement entre 1901 et 2000, la valeur établie pour 1906–2005 atteint 0,74 [0,56-0,92] °C.”
  • Niveau moyen de la mer : Augmentation de 20 cm depuis 1870.
  • “Sur l’ensemble de la planète, le niveau moyen de la mer s’est élevé de 1,8 [1,3-2,3] mm/an depuis 1961 et de 3,1 [2,4-3,8] mm/an depuis 1993, sous l’effet de la dilatation thermique et de la fonte des glaciers, des calottes glaciaires et des nappes glaciaires polaires.”
  • Couverture neigeuse dans l’hémisphère Nord : Diminution de 37 millions de km² à 35 millions de km² depuis 1920.
  • “Les données-satellite dont on dispose depuis 1978 montrent que l’étendue annuelle moyenne des glaces a diminué de 2,7 [2,1-3,3] % par décennie dans l’océan Arctique, avec un recul plus marqué en été (7,4 [5,0-9,8] %)”

1.2. La cause : Les Gaz à Effet de Serre

L’augmentation de concentration atmosphérique en GES (Gaz à Effet de Serre) : “Les variations de la concentration de gaz à effet de serre (GES) et d’aérosols dans l’atmosphère, de la couverture végétale et du rayonnement solaire modifient le bilan énergétique du système climatique. Les émissions mondiales de GES imputables aux activités humaines ont augmenté depuis l’époque préindustrielle ; la hausse a été de 70 % entre 1970 et 2004.”
  • Historique sur 400 000 ans (maîtrise du feu par l’Homme) suite à l’analyse d’un carottage d’une calotte glaciaire (Vostok) :
  • Source : CNRS


  • Depuis 400 000 ans : Variation de la concentration en CO2 (gaz carbonique) entre 200 ppm (partie par million = 0,0001%) et 280 ppm, et depuis quelques millénaires, plateau à 280 ppm. De même, variation de la concentration en CH4 (méthane) entre 350 ppb (partie par milliard = 0,0000001%) et 700 ppb, et depuis quelques millénaires, plateau à 700 ppb.
  • “Depuis 1750, sous l’effet des activités humaines, les concentrations atmosphériques de CO2, de méthane (CH4) et d’oxyde nitreux (N2O) se sont fortement accrues ; elles sont aujourd’hui bien supérieures aux valeurs historiques déterminées par l’analyse de carottes de glace portant sur de nombreux millénaires. En 2005, les concentrations atmosphériques de CO2 (379 ppm) et de CH4 (1 774 ppb) ont largement excédé l’intervalle de variation naturelle des 650 000 dernières années.”


  • Entre 1850 et aujourd’hui : Élévation de la concentration en CO2 à 380 ppm (+36%) et de la concentration en CH4 à 1,77 ppm (+150%).


  • 2. Quelques données sur les Gaz à Effet de Serre

    Le premier gaz à effet de serre est... l'eau (H2O). Mais les ordres de grandeur à l'oeuvre dans le cycle de l'eau sont tels, que les émissions humaines n'ont aucun impact sur la concentration en vapeur d'eau dans l'atmosphère. C'est la raison pour laquelle, alors qu'il représente près de 75% de l'effet de serre, il n'est généralement pas fait mention de la vapeur d'eau lorsque sont évoqués les gaz à effet de serre.

    2.1. Le Pouvoir de Réchauffement Global

    Tous les GES ne sont pas identiques. Certains "réchauffent" l'atmosphère plus que d'autres à concentration égale, certains ont une durée de vie dans l'atmosphère de quelques années, d'autres de quelques siècles. Pour comparer ces gaz, on a arbitrairement défini le PRG (Pouvoir de Réchauffement Global). Celui-ci se calcule en prenant en compte le surplus d'énergie que la terre a reçue pendant 100 ans suite à l'émission d'une certaine masse de gaz émise dans l'atmosphère, comparativement à une masse identique de dioxyde de carbone (CO2) :
    • L'impact sur le climat de l'émission d'une tonne de méthane (CH4) après un siècle est identique à celle de 25 tonnes de CO2. Le PRG du CH4 est donc de 25.
    • De même, l'émission d'une tonne de protoxyde d'azote (N2O) a un impact sur le climat équivalent à celle de 298 tonnes de CO2. Le PRG du N2O est donc de 298.
    • Le "champion" est l'hexafluorure de soufre (SF6), qui a un PRG égal à 22800.
    (Source : GIEC - "Fourth Assessment Report: Climate Change 2007")

    Pour estimer les émissions globales de GES, on utilise donc l'équivalent CO2, qui n'est rien d'autre que la quantité de chaque GES émis multiplié par son PRG.

    2.2. La répartition des émissions de GES en France

    2.2.1. Les GES les plus importants

    Les émissions de GES par un pays n'augurent en rien des émissions mondiales, mais on peut noter certaines similitudes, notamment en ce qui concerne les GES les plus émis : CO2 en tête, suivi de CH4 et N2O, puis la famille des HFC.
    Source : INSEE

    • Le gaz carbonique, ou dioxyde de carbone (CO2), est le GES dont les émissions sont de loin les plus importantes (70%). Il est très principalement issu de la combustion des éléments carbonés que sont le pétrole, le gaz et le charbon (à 95% environ) et ne provient que dans une faible proportion de la respiration des êtres vivants. Soit environ 354 Mt, d'après l'AIE, sur les 373 Mt répertoriées par l'INSEE en 2009. Pour l'exemple à nouveau, l'Allemagne dégage environ deux fois plus de CO2 que la France, soit 750 Mt, toujours d'après l'AIE. On pourra discuter de la pertinence d'une sortie éclair du nucléaire Outre-Rhin.

    • Le méthane (CH4) et le protoxyde d'azote (N2O) sont les deux autres GES dont les émissions sont significatives (12% chacun). Ils sont principalement issus de l'activité paysanne, environ à 75% pour le méthane et 95% pour le protoxyde d'azote. En effet, la fermentation de matières organiques, que ce soit dans le ventre des ruminants, ou dans leur fumier, produit du méthane. De même, l'épandage d'engrais dans les champs entraîne l'émission de protoxyde d'azote par les sols ainsi fertilisés. Ainsi, alors que l'énergie utilisée dans l'agriculture ne représente que 2% de l'énergie finale consommée, elle est responsable d'un cinquième des émissions de GES françaises.
    • Sachant que 75% de la Surface Agricole Utile nationale est dédiée directement ou indirectement à l'élevage (d'après le Ministère de l'Agriculture), la viande que nous produisons est responsable de 15% des émissions totales de GES. On pourra alors discuter de la pertinence d'une alimentation très carnée (environ 100 kg de bidoche par habitant chaque année, toujours d'après le Ministère de l'Agriculture) lorsque la production d'une seule calorie de viande rouge exige dix calories végétales.

    • Pour terminer, la grande famille des HydroFluoroCarbures, qui sont des gaz principalement présents dans les systèmes de réfrigération et les aérosols, donc d'origine principalement industrielle.

    2.2.2. Les émissions de GES par secteur d'activité

    Source : INSEE

    Pour information, on remarquera que les émissions de GES sont très équitablement réparties entre les différents secteurs d'activité, puisqu'elles sont principalement issues de la combustion de ressources fossiles (hors agriculture), comme vu précédemment.

    2.3. Les conclusions du GIEC

    Les activités humaines ont :
    • très probablement contribué à l’élévation du niveau de la mer au cours de la deuxième moitié du XXe siècle ;
    • probablement concouru au changement de la configuration des vents, qui a modifié la trajectoire des tempêtes extra-tropicales et le régime des températures ;
    • probablement entraîné une élévation de la température des nuits extrêmement chaudes et froides et des journées extrêmement froides ;
    • sans doute accru les risques de vagues de chaleur, la progression de la sécheresse depuis les années 1970 et la fréquence des épisodes de fortes précipitations.
    Le climat ayant une inertie très importante, l'impact des émissions de GES liées à l'activité humaine est compliqué à évaluer. Toujours est-il que l'on peut constater dès aujourd'hui certains phénomènes troublants.

    3. Perspectives

    3.1. Présentation des scénarios du GIEC

    L'avenir nous étant malheureusement opaque, nous ne connaissons pas la manière dont l'humanité va réagir face aux contraintes énergétiques et climatiques. Afin de fournir des axes de réflexion sur les risques encourus et les risques admissibles, et sur des objectifs chiffrés de réduction d'émissions de GES pouvant raisonnablement être atteints, le GIEC a établi six scénarios de développement possibles de l'humanité, dont voici les projections :

    Il semble compliqué d'arriver à retrouver n'est-ce que le niveau des émissions de gaz à effet de serre des années 2000. C'est la conséquence de la présence de CO2 dans l'atmosphère, car celui-ci met près d'une centaine d'année à en disparaître. Nos émissions de gaz à effet de serre actuelles, constituées principalement de CO2, seront l'héritage (ou plutôt une dette) que nous léguons aux générations suivantes.
    • Scénario A1 : monde caractérisé par une croissance économique très rapide, un pic de la population mondiale au milieu du siècle et l’adoption rapide de nouvelles technologies plus efficaces.
      • A1T : Sources d’énergie non fossiles.
      • A1B : Sources d’énergie fossiles et non fossiles.
      • A1F : Sources d’énergie principalement fossiles.
    • Scénario A2 : monde très hétérogène caractérisé par une forte croissance démographique, un faible développement économique et de lents progrès technologiques.
    • Scénario B1 : monde convergent présentant les mêmes caractéristiques démographiques que A1, mais avec une évolution plus rapide des structures économiques vers une économie de services et d’information.
    • Scénario B2 : monde caractérisé par des niveaux intermédiaires de croissances démographique et économique, privilégiant l’action locale pour assurer une durabilité économique, sociale et environnementale.

    3.2. Conséquences probables des scénarios à l’horizon 2100

    Les conséquences sur le climat des émissions de GES anthropiques (issues de l'activité humaine) sont souvent exprimées par une notion d'augmentation générale de la température à la surface du globe. La réalité est plus complexe, car les conséquences sont à la fois multiples, cumulables et hétérogènes. Voyons voir...

    3.2.1. Augmentation de la température moyenne mondiale

    L'augmentation de température moyenne à la surface du globe n'est pas uniformément répartie : L'amplitude du réchauffement local est plus importante pour les latitudes élevées. De même, l'impact de ce réchauffement sur l'alimentation et la santé mondiale est disparate. Les risques associés sont alors les suivants :

    Alimentation : Selon les projections (degré de confiance moyen), l'augmentation de la température moyenne au plan local, selon la culture considérée, entraîne une réduction du rendement agricole pour les régions et variations suivantes :
    • Hautes et moyennes latitudes : au delà de 1 à 3 °C ;
    • Faibles latitudes : dès 1 à 2 °C ;
    • Échelle mondiale : autour de 1 à 3°C.

    Santé : Selon les projections, les changements climatiques auront une incidence sur l’état sanitaire de millions de personnes, du fait notamment :
    • de l’intensification de la malnutrition ;
    • des modifications de la distribution géographique de certaines maladies infectieuses ;
    • de l’augmentation du nombre des décès, des maladies et des accidents dus :
      • à des phénomènes météorologiques extrêmes ;
      • à l’aggravation des conséquences des maladies diarrhéiques ;
      • à la multiplication des affections cardiorespiratoires liées aux fortes concentrations d’ozone troposphérique dans les zones urbaines.


    3.2.2. Élévation du niveau de la mer

    • La notion d'augmentation du niveau de la mer à horizon 2100 n'a qu'une valeur indicative, car "même si les émissions de gaz à effet de serre diminuaient suffisamment pour stabiliser la concentration de ces gaz, le réchauffement anthropique et l’élévation du niveau de la mer se poursuivraient pendant des siècles en raison des échelles de temps propres aux processus et aux rétroactions climatiques."
    • Ainsi, les augmentations probables de niveau des océans en 2100 ne sont guère impressionnantes (bien qu'elles puissent toutes engendrer l’inondation de basses terres, en particulier des deltas et des îles de faible altitude) mais elles n'en sont qu'à leur début : "On estime que la dilatation thermique entraînera à long terme une élévation de 0,2 à 0,6 m du niveau de la mer pour chaque degré Celsius d’augmentation de la température moyenne du globe par rapport à l’époque préindustrielle."
    • On pourra toujours se rassurer sur les grandes échelles de temps qui permettront à l'humanité de s'adapter en douceur. Cependant, "bien qu’il soit techniquement possible de s’adapter à une élévation de plusieurs mètres du niveau de la mer, les ressources à mettre en œuvre à cet effet sont réparties de manière si inégale que les possibilités d’adaptation sont considérées comme dépassées pour ce risque."
    C'est tout le problème de la contrainte en cisaille énergie/climat : Nos moyens d'agir s'amenuisent parallèlement à la manifestation accrue de l'impact défavorable du climat à notre encontre.

    3.2.3. Disponibilités en eau

    La disponibilité en eau suivant le scénario de développement A1B est le suivant.

    "Le volume des précipitations augmentera très probablement aux latitudes élevées, alors qu’il diminuera probablement dans la plupart des régions continentales subtropicales. [...] On anticipe avec un degré de confiance élevé que, d’ici au milieu du siècle, le ruissellement augmentera de 10 à 40 % aux latitudes élevées et dans certaines régions tropicales humides, y compris des zones peuplées de l’Asie de l’Est et du Sud-Est, et diminuera de 10 à 30 % dans certaines régions sèches des latitudes moyennes et des zones tropicales sèche."
    On notera le stress hydrique qu'est susceptible de rencontrer le bassin méditerranéen et notamment l'Europe, tandis que son alimentation énergétique sera de plus en plus précaire.


    4. Conclusion

    Le constat n'est guère brillant, mais l'optimisme peut encore être de mise, à condition de nous sortir la tête du sable au plus vite, et d'identifier nos faiblesses actuelles.


    Date de mise en ligne : mars 2012
     Dernière mise à jour : septembre 2012

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